VOORREDE XI
dit-on, le général Rapp, qui avait été aide de camp de 1’Empe-reur et qui occupait les mêmes fonctions auprès du souverain régnant, ne put, sur le coup, dissimuler un peu de saisisse-ment. Louis XVIII ne lui en conserva pas rancune.
Par contre, les correspondances diplomatiques du temps sem-blent bien indiquer qu’en Angleterre la mort du prisonnier de Hudson Lowe produisit une impression plus profonde. Les fonds publics montaient rapidement, et le baron Pasquier, notre ministre des affaires étrangères, pouvait, le 12 Juillet 1821, écrire a notre ambassadeur auprès du roi George, le comte de Cara-man: „Nous voyons par les gazettes anglaises que eet événement a fait en Angleterre plus de sensation qu’en France. Au moment qu’il termina sa carrière politique, l’imagination vive des Francais a dévancé 1’époque de sa mort, et la nouvelle n’en a fait aucune sensation.” Et de fait, dès le 7 Juillet, a Londres, des placards affïchés dans les rues invitaient” tous ceux qui admirent le talent et le courage dans 1’adversité” a prendre le deuil a 1’occasion de la mort pré-maturée de Napoléon Bonaparte. Plusieurs Anglais de marqué, et au premier rang Sir Robert Wilson, ainsi que „quelques Franpais obscurs” résidant a Londres, avaient été les premiers a se conformer a cette invi-tation. Et le comte de Caraman, dans une longue missive au baron Pasquier, observait que „1’espèce d’intérêt qui s’attache aux destinées extraordinaires” avait paru se réveiller a la nouvelle certaine de la mort de Napoléon. Ses ennemis les plus constants et les plus déclarés s’en étaient montrés frappés comme d’un événement remarquable et ceux qui affectaient de se dire ses partisans n’avaient pas dissimulé leurs regrets en cherchant a jeter sur le gouvernement 1’odieux d’une imputation que re-poussait également le genre de sa maladie et les circonstances qui avaient accompagnés et suivis sa fm. Le Morning Chroni-cle avait consacré a Napoléon un long article. Partout, pendant quelques jours il avait été question de cette agonie et de cette fin. Des détails sur la mort et 1’inhumation rapportés de Sainte-Hélène par un voyageur, avaient longuement défrayé les con-versations au Royal Society, a 1’India House, lorsque le président fit part a 1’assemblée du décès, un monsieur Lowndes se permit de dire: „alors, monsieur le président, félicitons nous.” Mais les murmures désaprobateurs de ses collègues montrèrent vite a 1’interrupteur qu’il eüt agi plus sagement en gardant le silence et même dans un généreux mouvement de révolte, un membre